Beaucoup d'analyses de sécurité sanitaire des aliments sont confiées et sous-traitées à des laboratoires indépendants souvent accrédités selon la norme ISO / IEC 17025. Que doit-on retrouver dans un rapport d'essai et que doit-on vérifier ?
Sommaire :
1) Comprendre l'accréditation ISO 17025, le rôle du COFRAC
2) Que doit-on retrouver sur un rapport d'essai ?
3) Comment lire un rapport d'analyses ?
Les rapports d'analyses ou " rapport d'essai " qui sont émis par les laboratoires fournissent les résultats d'auto-contrôles, et en tant qu'industriel exploitant ou client demandeur, vous devez vérifier un certain nombre d'éléments.
Travailler avec des laboratoires accrédités ou faire les analyses sous accréditation n'est pas obligation dans le cadre des auto-contrôles, même si c 'est plutôt conseillé. Les laboratoires non-accrédités doivent au minimum réaliser des essais interlaboratoires pour démontrer leur compétence sur les tests en question.
Comprendre l'accréditation ISO 17025, le rôle du COFRAC et les accords de reconnaissance.
L'accréditation est la reconnaissance formelle de la compétence technique d'un laboratoire à effectuer certaines analyses conformément à la norme internationale ISO/CEI 17025. Pour être très précis : l'accréditation COFRAC atteste de la compétence du laboratoire pour les seuls essais couverts par l'accréditation. Ces essais ou analyses sont listés dans l'annexe technique à l'attestation d'accréditation. Les attestations et les annexes techniques de chaque laboratoire accrédité sont disponibles sur le site du COFRAC.
La conformité à la norme ISO/IEC 17025 exige que les laboratoires démontrent leur compétence, leur impartialité et leur intégrité.
Travailler avec un laboratoire accrédité, c'est s'assurer que le laboratoire rend des résultats selon les standards de "qualité" les plus élevés.
En France, le COFRAC accrédite les laboratoires
Le COFRAC (Comité Français d'Accréditation) est l'organisme national qui est chargé, en France, de l'accréditation des laboratoires d'essais, des laboratoires de calibration, des organismes de certification et d'inspection. Son rôle principal est de garantir la compétence technique et l'impartialité de ces laboratoires ou organismes.
Chaque laboratoire accrédité reçoit une attestation d'accréditation associé à un numéro unique. L'attestation technique, elle, répertorie les tests analytiques ( méthode et matrice alimentaire concernée ) pour lesquels le laboratoire est accrédité : c'est la portée d'accréditation. Le statut d'accréditation d'un laboratoire peut être vérifié sur le site web du COFRAC.
Les laboratoires sont régulièrement audités selon la norme ISO 17025, ce qui assure leur compétence sur la durée.
A l'international, comment marche l'accréditation ?
Les laboratoires opérant hors France ne sont pas accrédités par le COFRAC mais sont accrédités sur le même référentiel ISO/CEI 17025, par d'autres organismes d'accréditation nationaux tels que l'UKAS au Royaume uni, le BELAC en Belgique etc..
L'accréditation fournie par ces organismes nationaux est équivalente s'ils sont signataires d'accords de reconnaissance.
- Europe : EA (European co-operation for Accreditation) est l'organisation qui regroupe les organismes d'accréditations signataires d'accords de reconnaissance (MLA pour Mutual Recognition Agreement)
- A l'internantional : ILAC (International Laboratory Accreditation Cooperation) a également un accord de reconnaissance mutuelle (MRA pour Mutual Recognition Arrangement) qui assure que les accréditations délivrées par un membre de l'ILAC sont reconnues par tous les autres membres.
L'accréditation ISO/CEI 17025 et les accords de reconnaissance renforcent la confiance dans les échanges commerciaux. Les entreprises et les gouvernements peuvent s’appuyer sur les résultats des tests et analyses car ils sont basés sur des normes internationalement reconnues et comparables quel que soit le pays d’origine. Cette confiance facilite le commerce international et améliore sans cesse la sécurité et la qualité des produits échangés.
💡 Les rapports d'essai de deux laboratoires accrédités par des organismes signataires d'accords de reconnaissancesont équivalents !
Que doit-on retrouver sur un rapport d'essai ?
Un rapport d'essai ou rapport d'analyse est un document essentiel dans le domaine de la sécurité sanitaire des aliments. Il présente les résultats d'analyses réalisées par des laboratoires indépendants accrédités (ou pas d'ailleurs) sur des échantillons soumis à analyse. Ce rapport doit répondre à des règles très strictes qui sont reprises dans la norme ISO/CEI 17025. Beaucoup de laboratoires tendent à utiliser le même "format" de rapport même si ils ne disposent pas d'accréditation.
Quelles sont les mentions obligatoires sur un rapport d'essai ?
La norme ISO/IEC 17025 spécifie clairement les mentions qui doivent figurer sur un rapport d'analyses, notamment dans le chapitre 7.8.2, Exigences communes relatives aux rapports
- Un titre : exemple : Rapport d'essai, Rapport d'analyses, Certificat d'analyses,
- Un N° unique de rapport.
- Vos coordonnées (en tant que client).
- Nom et adresse du laboratoire, numéro du laboratoire (son n° d'accréditation).
- Lieu d'exécution des activités, cela peut être au laboratoire bien sûr, mais aussi parfois dans votre usine si des mesures sont faites "In-situ"
- L’identification unique, de sorte que chaque élément soit considéré comme faisant partie d'un seul et même rapport ex: "ce rapport comporte 3 pages"
- L’identification de la méthode utilisée :
- Elle doit être appropriée, si vous ne spécifiez pas de méthode, le laboratoire choisira la plus adaptée possible.
- A jour, le laboratoire doit s'assurer d'utiliser la dernière version d'une norme par exemple.
- Validée, avec évaluation de l'incertitude associée.
- Les écarts aux méthodes doivent être clairement indiqués, ou "négociés" et acceptés à l'avance avec le client.
- La description, l’identification non ambiguë et, si nécessaire, l’état de l'objet : c 'est à dire votre échantillon.
- La date de réception de chaque échantillon soumis à l’essai, la date d’échantillonnage si c 'est pertinent pour la validité et l’application des résultats.
- La date de l'analyse.
- La date d'édition du rapport d'analyse.
- Une référence au plan et à la méthode d'échantillonnage utilisés par le laboratoire, si c'est lui qui a procédé à l'échantillonnage.
- Une déclaration selon laquelle les résultats ne se rapportent qu’aux échantillons soumis à l'analyse, là encore les résultats d'analyses ne sont toujours rendus que sur un échantillon, il appartient à l'industriel de valider que l'échantillon est représentatif de son lot, son stock etc..
- Les résultats avec, s’il y a lieu,
- Les unités de mesure
- L'incertitude de mesure exprimée sur la même unité que le résultat (mesurande) ou bien en % relatif (l'incertitude (U) est affichée si le client l'exige, si elle est importante pour la validité ou encore si elle affecte la conformité par rapport à une spécification ou une exigence.)
- Toute information relative aux conditions de l'analyse, comme la température par exemple.
- De avis ou des interprétations, que seuls des personnes autorisées puissent donner.
- L’identification de la ou des personnes autorisant le rapport.
- Une identification claire pour les résultats provenant de prestataires externes dans le cas où le laboratoire sous-traite certaines analyses.
- Une mention qui indique que le rapport ne peut être reproduit ou communiqué que dans sa forme intégrale avec l'accord préalable du laboratoire pour éviter que des résultats soient communiqués hors contexte par exemple.
Que faut il vérifier avant d'envoyer votre échantillon en analyse ?
Tout d'abord, lorsque vous sous-traitez vos analyses alimentaires, et avant même de recevoir un rapport d'essai, une attention particulière doit -être portée à quelques éléments :
- La représentativité de l'échantillon que vous envoyez en analyse. Gardez à l'esprit qu'un laboratoire vous rendra toujours un résultat d'analyse sur un échantillon et jamais sur un lot, un produit, une marque etc.
- La quantité d'échantillon nécessaire à la réalisation de l'analyse. Bien évidemment il faut un minimum requis pour lancer techniquement l'analyse, mais parfois la quantité nécessaire pourra être très élevée lors d'analyses rendues sous accréditation ou bien lors de contrôles officiels : exemple : mycotoxines, Pesticides.
- L'identification la plus précise possible de votre échantillon.
- La commande claire de l'analyse souhaitée qui est indissociable d'une méthode (Norme de type NF EN ISO) d'une technique, ou associée à une référence chez votre laboratoire.
- Une spécification éventuelle de la teneur, d'une limite attendue, qui est indissociable de l'unité sur laquelle sera rendu le résultat. En somme : être en capacité de savoir sur quoi vous aller comparer votre résultat d'analyse pour en apprécier la conformité ou l'écart !
💡 Utilisez un bon de commande clair et précis pour détailler l'ensemble de ces points. Un N° de commande en interne doit permettre de récupérer toute la traçabilité de votre demande. Votre bon de commande doit contenir aussi tous les éléments contractuels comme le prix, le délai, l'adresse d'envoi du rapport, la personne à contacter etc.
Comment lire un rapport d'analyses ?
🤔Tous les laboratoires ne sont pas accrédités, et tous les laboratoires accrédités ne rendent pas des résultats sous-accréditation. Dans tous les cas, le format des rapports d'analyses à tendance à se normaliser, même pour les laboratoires qui ne sont pas accrédités.
En tant que "client demandeur", voici ce que vous devriez vérifier au minimum :
L'identification :
Si le laboratoire est accrédité, en général son N° d'accréditation devrait apparaitre avec le logotype COFRAC. Votre échantillon devrait aussi avoir un N° d'identification au même titre que le rapport. Le rapport d'essai doit comporter une description détaillée de l'échantillon analysé. Cette description inclut les informations que vous aurez préalablement indiquées telles que la provenance de l'échantillon, la date de prélèvement, le n° de lot, le code article du produit, et tout ce qui peut permettre d'identifier votre échantillon. Certaines conditions peuvent aussi être spécifiées pour apporter le plus d'éléments au résultat (comme la température, l'unité de conditionnement etc.)
Si des résultats sont rendus sous accréditation, ils doivent clairement apparaitre vis à vis d'autres résultats (avec une étoile un "A", un " * " , une coche etc..) et une mention du type : "essais couverts par l'accréditation"
Les résultats :
Le rapport doit présenter sans ambiguïté les résultats des analyses effectuées sur l'échantillon. Ces résultats sont généralement exprimés avec des unités de mesure spécifiques et il est important de vérifier que les unités utilisées soient identiques à celles spécifiées dans les réglementations en vigueur ou dans les usages professionnels. Cela garantit la comparabilité des résultats, la cohérence des interprétations et évite les risques d'erreurs.
💡 Par exemple : si vous vous appuyez sur une unité comme les ppb pour l'analyse des Métaux Lourds (cela arrive dans certains pays) et que le résultat de l'analyse est liée à une règlementation comme le règlement CE N° 915/2023, il y a de fortes chances que le laboratoire exprime le résultats en mg/Kg, ce qui pourrait vous poser un problème de conversion pour juger de la conformité.
Le nom des analytes testés doit aussi être sans ambiguïté, si un élément chimique est testé, l'identification claire avec le N° CAS est un vrai plus, au même titre que le nom scientifique de certains germes pathogènes.
⚠️ Attention si vous travaillez avec des laboratoires anglo-saxons à l'expression des résultats avec séparateurs :
Ex : Flore totale : 1 000 UFC/g pourrait apparaitre sur un rapport anglo-saxons de cet cette façon = Total Plate count : 1,000 CFU/g
Les incertitudes de mesure :
Le rapport d'essai peut inclure (ce n'est pas spécifiquement une obligation) les incertitudes de mesure pour chaque résultat. Les incertitudes sont souvent exprimées sur l'unité du résultat au format " +/- " avec les intervalles de confiance élargie (K=2 à 95%), Elles reflètent la fiabilité des mesures qui tiennent compte des erreurs potentielles.
Les incertitudes peuvent avoir un impact très important lorsque l'on doit poser une conformité vis à vis d'une limite règlementaire. En tant que demandeur, vous devez absolument les prendre en compte !
Par exemple :
Exemples de résultats d'analyses d'un métal lourd avec une incertitude de 30% et une limite règlementaire de 1 mg/kg
- Cas N° 1 = Valeur conforme à la limite règlementaire avec +/- incertitude
- Cas N° 4 = Valeur non conforme à la limite règlementaire avec +/- incertitude
- Cas N° 2 = Valeur conforme avec un "risque" d'être non conforme avec + incertitude
- Cas N° 3 = Valeur non conforme avec un "risque" d'être conforme avec - incertitude
Dans le cas de valeurs "limites" dont l'incertitude chevauche la teneur maximale :
- L'incertitude doit être retranchée* à la valeur avant de statuer sur la conformité règlementaire. Cela concerne les cas où les analytes n'entrainent pas de toxicité aigüe (Cas N° 3 devient conforme)
- Mais elle ne doit pas être retranchée* dans le cas où les analytes entrainent un risque de toxicité aigue (ex: Biotoxines marines, alcaloïdes) (Cas N° 3 reste non conforme)
⚠️ * Se référer notamment à la note technique DGAL/MUS/2023-11 qui détaille parfaitement le sujet !
Les abréviations :
Sur de nombreux rapports d'analyses, des abréviations sont utilisées. Elles doivent être détaillées et traduites pour éviter toute mauvaise interprétation. Si vous avez un doute : faîtes confirmer clairement certaines significations par le laboratoire.
Par exemple :
- ppm = mg/kg
- LoQ / LQ = Limite de quantification
- LoD / LD = Limite de détection
- HAP = Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques
- ST = Sous-traitée
- Ne = Nombre estimé
- ND : non détécté
- U = Incertitude (Uncertainty)
- Etc.
Les méthodes d'analyses :
Le rapport d'essai doit également inclure des informations sur la méthode d'analyse utilisée. Cela permet de vérifier la validité du résultat, de lui donner un certain "poids" et permet de reproduire les analyses dans un autre laboratoire afin de mener des comparaisons.
De même, les laboratoires accrédités doivent suivre des méthodes normalisées de type ISO, NF, Ph.Eur etc.. , cela garantit la fiabilité et la reproductibilité des résultats puisque ces méthodes sont déjà validées et "éprouvées". Dans le cas contraire les méthodes développées ou dites "internes" doivent être validées.
💡 Attention aux choix des méthodes quant à ce qui doit être mesuré. Certaines ont parfois de faibles spécificités (méthodes colorimétriques, spectrophotométriques) là oùu d'autres sont beaucoup plus précises et spécifiques (méthodes basées sur la LC-MS/MS)
Les commentaires du laboratoires
Un rapport d'essai peut également comporter des commentaires et des recommandations, en particulier si des non-conformités ont été détectées.
Ces informations peuvent être essentielles pour les industriels afin de prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité et la qualité de leurs produits. Seules certaines personnes autorisées et désignées comme telle peuvent donner des recommandations et des commentaires, mais attention, le laboratoire ne s'appuiera que sur les seuls résultats qui concerne l'échantillon pour donner un avis.
💡 En cas de doute, si certaines choses ne sont pas claires, n'hésitez pas à contacter le laboratoire pour échanger sur les résultats, la règlementation etc..
Vos sous-traitants sont toujours ouverts à la communication et vous pourrez en plus en apprendre beaucoup lors de ces échanges !
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